vendredi 2 septembre 2016

THEME 1A. GENETIQUE ET EVOLUTION. Diversification génétique et diversification des êtres vivants(TS)

Nous avons vu que les crossing-over inégaux donnent naissance à des familles multigéniques, c'est à dire à de nouveaux gènes produisant de nouvelles protéines assurant de nouvelles fonctions. C'est un mécanisme important de l'évolution mais ce n'est pas le seul.

Les mécanismes de polyploïdisation

Chez les végétaux
Le blé est une céréale utilisée depuis fort longtemps.




Lorsqu'on étudie le caryotype des différentes espèces, on constate que le nombre de chromosome est différent d'une espèce à l'autre. 


On peut constater que le nombre de chromosome est multiplié par 2 lorsqu'on passe de Triticum monococcum à Triticum turgidum et par 3 lorsqu'on passe de T. monococcum à T. aestivum.
Cela signifie que que T. turgidum est tétraploïde et  T. aestivum hexaploïde. On appelle ces phénomènes des polyploïdisations.
Les mécanismes à l'origine de la polyploïdie sont variés. Ils proviennent soit d'une méiose, soit d'une mitose anormale.
On a ainsi pu reconstitué l'histoire du blé depuis son origine :

Il se pose alors un problème : si T. aestivum contient 3 fois les mêmes chromosomes provenant de T. monococcum, cela signifie qu'il contient plusieurs fois les mêmes gènes, ce qui est peu vraisemblable puisque chaque gène occupe un locus précis sur un chromosome déterminé.
Intéressons nous aux gènes codant pour des protéines intervenant dans la constitution du gluten, les gluténines. Nous travaillerons sur le gène A avec le logiciel Anagène
En ce qui concerne les ADN, on obtient les résultats suivants :
T. monococcum/T. turgidum : 34,3% de différences
T. monococcum/T. aestivum : 37,5% de différences
T. turgidum/T. aestivum : 27,1% de différences
En ce qui concerne les polypeptides (gluténines), on obtient les résultats suivants :
T. monococcum/T. turgidum : 60% de différences
T. monococcum/T. aestivum : 47,6% de différences
T. turgidum/T. aestivum : 78,6% de différences 
Les gluténines A sont donc différentes d'une espèce à l'autre. Cette exemple monte qu'outre la polyploïdisation, de nombreuses mutations ont permis une diversification importante des espèces de blé.  

Chez les Mammifères
Si le phénomène de polyploïdisation est assez courant chez les végétaux, il est, en revanche beaucoup plus rare chez les animaux et particulièrement chez le Mammifères.  
On connait depuis peu, le cas du Rat-Viscache de Barrera (Tympanoctomis barrerae) 

  

Les cas connus de polyploïdisation sont indiqués sur l'arbre ci-dessous :

Apparition de nouveaux groupes par symbiose

Les lichens constituent un groupe végétal très particulier; Les lichens sont capables de vivre dans des conditions extrêmes de froid ou de sécheresse.

Lichens poussant sur des troncs


Un grand nombre de lichens pousse directement sur la roche.


Le lichen des Rennes est une espèces qui peut pousser dans l'extrême nord de la Laponie. Il est alors la seule source de nourriture des troupeaux de Rennes.


Les lichens forment des thalles (c'est à dire des structures végétales qui n'ont pas de vaisseaux conducteurs de sève) qui ont des formes très variées selon les espèces.



Si on observe une coupe de lichen au microscope, on constate l'existence de deux types de cellules. Certaines sont allongées en forme de filaments : ce sont des cellules de champignon. D'autres sont arrondies, naturellement de couleur verte : ce sont des cellules d'algue.


Le lichen est donc l'association d'une algue et d'un champignon. Le texte suivant, écrit vers 1920, indique bien la nature de cette association :


Cette association à bénéfice réciproque est appelée une symbiose (vivre ensemble). L'algue produit pas photosynthèse des glucides que le champignon prélève en partie. En retour, le champignon protège l'algue contre le froid et la sécheresse. C'est ce qui explique la réussite extraordinaire des lichens dans les milieux extrêmes.
D'autres symbioses existent dans la nature (le Poisson-Clown avec l'Anémone de mer, Les Zooxanthelles avec les coraux) mais aucune autre n'a donné naissance à de nouveaux êtres vivants à part entières, caractéristique de processus évolutif.

Les gènes homéotiques et leurs mutations

L'adaptation au vol de la Chauve-souris

 Schéma de fonctionnement d'un gène homéotique

 
Carollia perspicillata est un petit Chiroptère frugivore d'Amérique du sud, d'un poids de 15 g environ.

Le squelette de l'aile de l'espèce est le suivant. Le doigt 1 correspond au pouce.


La chauve-souris et la souris ont environ le même poids. On peut donc facilement comparer la morphologie des deux animaux.
s = stylopode, qui correspond au bras pour le membre antérieur
z : zeugopode, qui correspond à l'avant bras pour le membre antérieur
a = autopode qui correspond à la main et les doigts pour le membre antérieur


L'étude comparée du développement embryonnaire des 2 espèces permet de constater que la croissance du membre antérieur, et particulièrement des doigts, est plus importante chez la chauve-souris que chez la souris



D'où provient cette différence de croissance ? 
On sait que le gène du développement PMP2 intervient dans l'ossification. Une comparaison entre les séquences protéiques BMP2 de souris et de chauve-souris montre 74,9% de différences. La protéine de chauve-souris est beaucoup plus courte que celle de souris.
On a entrepris de nombreuses expériences sur cette protéine, résultat de l'expression du gène BMP2.

Expérience 1 : traitement d'un membre de chauve-souris à la protéine BMP2


 
Expérience 2 : traitement de métatarsiens de rat à des doses croissantes de protéine BMP2


On constate :
1) qu'un augmentation du taux de protéine BMP2 sur un embryon de chauve-souris entraine une augmentation de la longueur des os antrérieurs
2) que lorsqu'on traite des métatarsiens de rat à la protéine BMP2 de chauve-souris, plus le taux de protéine administré est élevé, plus le métatarsien s'allonge.
On peut donc en conclure que la différence de séquence entraîne une différence d'expression et chez la chauve-souris, le taux de protéine BMP2 produit est beaucoup plus élevé que chez la souris.
  
Lors d'expériences, on a pu constater que l'expression d'un gène baptisé PRX1 est beaucoup plus importante chez la chauve-souris que chez la souris.

La chauve-souris est en haut


Ce gène code pour une protéine qui provoque l'allongement des os. Les souris mutantes pour ce gène présentent des anomalies de  croissance des os.


L'analyse de la séquence d'ADN du gène PRX1 chez la souris et chez la chauve-souris montre une différence très faible de 1,9%. En revanche, la séquence régulatrice présente 19,1% de différences. 
Rappelons par un schéma simple le rôle d'une séquence régulatrice :


Pour vérifier l'hypothèse selon laquelle, ce sont les variations de la séquence régulatrice qui provoquent la différence d'action de la protéine PRX1, des chercheurs ont procédé à une transgenèse selon le schéma suivant :


Le résultat obtenu quant  à l'action de la séquence régulatrice sur l'activité PRX1 est donnée sur le graphique suivant :


On constate que l'activité PRX1 est plus importante chez la souris transgénique que chez une souris normale. C'est donc bien la variation de la séquence régulatrice qui induit la variation d'activité du gène PRX1. 
L'ensemble de ces études sur 2 gènes du développement chez la chauve-souris montrent bien, les nombreux processus de modification et de diversification du vivant au niveau des plans d'organisation.
 
La transmission culturelle des comportements

Nous allons travailler sur un exemple fameux, celui d'un singe, le Macaque japonais (Macaca fusca).


Le Macaque japonais est très étudié car c'est une des espèces qui présentent la plus grande aptitude à modifier son comportement.
Une des premières observation a été l'apparition du comportement de baignade dans les eaux thermales chaudes durant l'hiver dans les années 50-60.


Un jeune s'est installé dans l'eau chaude, puis petit à petit un groupe de jeunes. En revanche, lessinges plus vieux ne changent pas de comportement. Ensuite, les jeunes devenus adultes transmettent aux jeunes cette activité. Il y a donc transmission d'une culture particulière à un groupe.
Il est à remarquer que la baignade est l'apanage des singes dominants.
Dans les mêmes années et selon le même mécanisme, dans une région différente du Japon, d'autres traditions sont apparus.
En premier lieu, le nettoyage des patates douces dans l'eau.


Une photo historique de la première observation du lavage des patates douces et de la transmission de la technique à un petit.


Plus tard, le même groupe de Macaque triera les grains de blé et les séparera du sable en les mettant dans l'eau de mer.
Plus récemment, on a pu observé chez certains groupes de Macaque, l'apparition d'un comportement de manipulation de pierres et sa transmission aux jeunes générations.


Tout ces comportement ont été récemment acquis et montre la capacité des animaux à transmettre des techniques acquises, parfois complexes.
Ces comportements acquis s'ajoutent à des comportements innés, par exemple l'épouillage chez le Macaque.


Ces comportements ritualisés permettent le maintient d'une hiérarchie, donc d'une cohésion du groupe. 
On a pendant longtemps pensé que l'innovation dans le domaine de l'acquisition de nouveaux comportements ou l'utilisation de nouveaux outils étaient une spécificité humaine. Les découvertes en éthologie de ces cinquante dernières années prouvent le contraire.
Aujourd'hui, ces transmissions intergénérationnelles de comportement sont considérées comme des facteurs d'évolution appartenant au domaine de l'épigénétique.
On voit que les processus de diversification d'une espèce sont très nombreux et très variés. 

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